Cancer du Sein Solidarité

Réentraînement mixte et qualité de vie après un cancer du sein


En 2018, une étude scientifique menée à l’Université Grenoble Alpes par Maïwenn Chadouteaux analyse l’impact d’un programme de réentraînement mixte sur la condition physique et le bien-être de femmes ayant surmonté un cancer du sein. L’objectif était d’évaluer comment des séances combinant endurance cardio-respiratoire et renforcement musculaire pouvaient améliorer la mobilité des épaules, réduire certains symptômes et influencer la qualité de vie.


Contexte de l’étude


Selon l’Institut national du cancer (INCA), le cancer du sein représentait près de 59 000 nouveaux cas en France en 2017. Grâce aux progrès du dépistage, une majorité des cas est aujourd’hui détectée à un stade précoce. Toutefois, les traitements laissent souvent des séquelles durables, comme une perte de mobilité, une fatigue persistante, ou encore des troubles psychologiques. Dans ce contexte, l’activité physique apparaît comme une thérapie non médicamenteuse et adjuvente aux protocoles de soins.


L’étude, conduite en 2018, a suivi cinq femmes âgées de 28 à 82 ans pendant huit semaines. Les participantes ont suivi une à deux séances hebdomadaires durant une heure, adaptées individuellement à leur état de santé et à leurs capacités physiques, chaque séance.


Un protocole basé sur le renforcement et l’endurance


Chaque séance se déroulait en plusieurs étapes : échauffement, exercices d’endurance sur vélo, ateliers de renforcement musculaire, puis retour au calme avec étirements et respiration. Ce cadre ritualisé a permis d’instaurer une régularité favorable à la progression.


Les exercices ciblaient les membres supérieurs et inférieurs, l'équilibre, la coordination, la dissociation, avec un suivi personnalisé de la fréquence cardiaque et de l’intensité. Cette approche bio-psycho-sociale visait à associer bien-être physique et équilibre mental.


Des résultats significatifs sur la mobilité de l’épaule


Au terme des huit semaines, les résultats ont montré une amélioration notable de la souplesse des épaules affectées par le cancer. L’amplitude a progressé de 62,5 % pour les patientes touchées du côté gauche, et de 9,4 % pour celle atteinte du côté droit. Ces chiffres confirment que le réentraînement mixte agit favorablement sur la mobilité fonctionnelle.


Cette amélioration est cruciale, car la raideur de l’épaule constitue un handicap fréquent après chirurgie et radiothérapie. En retrouvant une meilleure mobilité, diminution du lymphoedème, les participantes ont pu reprendre plus facilement certaines activités quotidiennes ainsi qu'une reprise professionnelle confortable.


Effets sur la fatigue et l’endurance


La fatigue liée au cancer du sein touche environ 80 % des patientes. Elle est décrite comme persistante et disproportionnée par rapport à l’activité. L’étude a utilisé plusieurs outils pour évaluer cette perception, notamment les échelles de Piper et de Pichot.


Les formes de fatigue mentionnées dans les échelles précédentes sont : sociales, physiques et émotionnelles.


Les résultats ont montré des réponses contrastées. Certaines patientes ont perçu une baisse de fatigue après les séances, surtout celles pratiquant deux fois par semaine. D’autres ont signalé une stabilisation, voire une légère hausse. Cela suggère que la fréquence, l’intensité et la situation personnelle influencent les effets ressentis.


En revanche, les tests d’endurance ont montré une amélioration de la capacité cardio-respiratoire. La fréquence cardiaque mesurée pour un effort donné a diminué, signe d’une meilleure adaptation physiologique.


Les résultats de l’étude mettent en lumière deux tendances principales.

Concernant la fatigue, les questionnaires montrent des évolutions contrastées : l’échelle de Piper a révélé une augmentation de 28,5 % de la dimension sensorielle et de 21,6 % de la dimension affective, alors que l’échelle de Pichot a mis en évidence une diminution notable de la fatigue pour la participante pratiquant deux séances par semaine, passant d’un score de fatigue excessive (>22/32) à un score faible. Pour les participantes avec une séance hebdomadaire, la fatigue s’est améliorée immédiatement après l’effort mais sans progression marquée au fil du programme.


Impact psychologique : anxiété et dépression


Le cancer du sein entraîne souvent un état anxieux ou dépressif. Dans cette étude, les questionnaires HADS ont révélé une baisse de 37,5 % de l’anxiété et une réduction de 5,9 % de la dépression. Les patientes restaient toutefois en dessous des seuils cliniques, ce qui confirme un impact positif modéré.


Ces résultats sont cohérents avec d’autres recherches montrant que l’activité physique encadrée favorise la régulation émotionnelle, réduit l’appréhension liée aux mouvements (kinésiophobie), et soutient la confiance en soi.


Perception de la qualité de vie


L’échelle de qualité de vie EORTC QLQ-C30 a montré une amélioration globale de 57 % sur les symptômes, notamment la douleur et la fatigue. La dimension sociale et physique a progressé de manière significative, même si la perception globale de la qualité de vie a légèrement fluctué.


Ces données confirment qu’un programme structuré, même court, peut influer sur le bien-être ressenti. Toutefois, la durée de huit semaines reste probablement insuffisante pour mesurer des effets durables et généralisables.


Limites et perspectives


Cette étude présente des limites. L’échantillon de cinq participantes est restreint, et l’absence de groupe témoin réduit la portée des conclusions. De plus, certaines participantes ont dû manquer des séances pour raisons médicales.


Cependant, les résultats encouragent la mise en place de programmes similaires, notamment après chimiothérapie ou en phase de rémission. Définir des intensités optimales et proposer un suivi plus long permettrait d’affiner les recommandations pour ce public.


Conclusion


Le réentraînement mixte apparaît comme une approche prometteuse pour améliorer la mobilité des épaules, réduire certains symptômes et soutenir la qualité de vie des femmes après un cancer du sein. Si les effets sur la fatigue restent variables, les bénéfices observés sur l’endurance et l’équilibre psychologique méritent d’être approfondis.


Cette étude rappelle l’importance de l’activité physique adaptée comme complément aux traitements médicaux. Elle confirme aussi la nécessité de recherches supplémentaires pour définir des protocoles optimisés, capables d’apporter un soutien durable aux patientes.



Sources